Guinée : le CNRD fait une « proposition médiane d’une durée consensuelle de la transition de 39 mois »

Article : Guinée : le CNRD fait une « proposition médiane d’une durée consensuelle de la transition de 39 mois »
Crédit: Wikimedia Commons
1 mai 2022

Guinée : le CNRD fait une « proposition médiane d’une durée consensuelle de la transition de 39 mois »

La plus grande inconnue de l’équation de la transition en Guinée a été dévoilée ! Dans un art d’adresse à la nation, dont la touche communicationnelle restera sûrement dans les annales de l’histoire guinéenne, le président du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD), tombeur d’Alpha Condé, a levé le voile sur la cachoterie de la transition qu’il mène. C’est désormais chose faite : les Guinéens ont une idée de la durée que va prendre les préparatifs d’un retour à l’ordre constitutionnel : 39 mois proposés.

Doumbouya, le président de la démarcation ?

C’est d’abord la première fois qu’un président guinéen choisit une salle de classe pour une adresse à la nation. Mais avant de se tenir en face de ces élèves du Collège de Boffa, devant leur tableau barbouillé d’équations chimiques, pour dévoiler son équation politique, le président de la transition était dans la région pour apporter son soutien aux fidèles chrétiens de Guinée dans leur pèlerinage. Là aussi, c’est une première pour un chef d’Etat guinéen. Mais nous n’allons pas nous attarder sur la forme de cette adresse à la nation historique. Parlons du fond.

La pédagogie du CNRD

Dans la charte de la transition rendue publique en septembre dernier, les autorités de la transition n’ont pas clairement défini la durée que prendra leur mission à la tête du pays. Plusieurs observateurs y avaient alors vu une volonté inavouée de s’éterniser au pouvoir. Mais le CNRD avait rassuré qu’une étape aussi importante ne sera pas décidée de façon unilatérale. La junte s’est montrée assoiffée de consensus ; elle s’était contentée de dire que toute question relative au chronogramme de la transition sera traitée par l’ensemble des forces vives du pays. Des mois après donc, après un vent de critique au sein de l’opinion que le soupçonne de jouer à la montre, le colonel-président décide de mettre fin au débat. Il faut dire que des partie parties prenantes dans la situation guinéenne (les acteurs politiques, le Front national pour la défense de la constitution et la CEDEAO) n’ont pas arrêté de mettre la pression sur les hommes du 5 septembre 2021.

C’est donc après avoir reçu et analysé toutes les proposition emmenant des forces vives que les autorités décident de se prononcer sur cette épineuse question de timing. D’abord cette semaine, le ministère de l’Administration du territoire et de la décentralisation (MATD) a présenté le rapport synthèse de ces propositions. On sait que les plus « pressés » sont les politiques dont le souhait rôde autour de 18 mois pour retour des civils au pouvoir. Les propositions de la société civiles, elles, sont plus clémentes, puis qu’elles se situent aux abords des deux ans. C’est dans tout ce brouhaha que les militaires ont fait leur proposition.

« 𝗗𝗲 𝘁𝗼𝘂𝘁𝗲𝘀 𝗹𝗲𝘀 𝗰𝗼𝗻𝘀𝘂𝗹𝘁𝗮𝘁𝗶𝗼𝗻𝘀 𝗲𝗻𝗴𝗮𝗴𝗲́𝗲𝘀 𝗮̀ 𝘁𝗼𝘂𝘀 𝗹𝗲𝘀 𝗻𝗶𝘃𝗲𝗮𝘂𝘅 𝗱𝗲𝗽𝘂𝗶𝘀 𝗹𝗲 𝗱𝗲́𝗯𝘂𝘁 𝗱𝗲 𝗹𝗮 t𝗿𝗮𝗻𝘀𝗶𝘁𝗶𝗼𝗻, 𝗮𝘃𝗲𝗰 𝘁𝗼𝘂𝘁𝗲𝘀 𝗹𝗲𝘀 𝗰𝗼𝗺𝗽𝗼𝘀𝗮𝗻𝘁𝗲𝘀 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗻𝗮𝘁𝗶𝗼𝗻, 𝗮𝘂𝗽𝗿𝗲̀𝘀 𝗱𝗲 𝘁𝗼𝘂𝘀 𝗹𝗲𝘀 𝗚𝘂𝗶𝗻𝗲́𝗲𝗻𝘀 𝗽𝗮𝗿𝘁𝗼𝘂𝘁 𝗼𝘂̀ 𝗶𝗹𝘀 𝘀𝗲 𝘁𝗿𝗼𝘂𝘃𝗲𝗻𝘁, 𝗶𝗹 𝗿𝗲𝘀𝘀𝗼𝗿𝘁 𝘂𝗻𝗲 𝗽𝗿𝗼𝗽𝗼𝘀𝗶𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗺𝗲́𝗱𝗶𝗮𝗻𝗲 𝗱’𝘂𝗻𝗲 𝗱𝘂𝗿𝗲́𝗲 𝗰𝗼𝗻𝘀𝗲𝗻𝘀𝘂𝗲𝗹𝗹𝗲 𝗱𝗲 𝗹𝗮 t𝗿𝗮𝗻𝘀𝗶𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗲 𝟯𝟵 𝗺𝗼𝗶𝘀. »

Colonel Mamadi Doumbouya

Très clairement, on voit que la junte est attachée au consensus : sachant même qu’elle n’a considéré que les aspirations des forces vives, elle ne veut pas se mettre dans une posture d’imposition. Surtout que de lourds partenaires (les principales coalitions politiques et le FNDC) ont d’ores et déjà montré leur désaccord à toute durée excédant deux ans. Face alors à toutes ces raisons, le CNRD joue la carte de l’apaisement en parlant de « proposition médiane ». Il propose donc, lui aussi, une durée, au lieu de l’imposer. Plutôt salutaire parce que ça voudrait dire qu’un éventuel cadre de discussion n’est pas à exclure pour trouver un accord définitif. Mais en attendant, le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est un très grand pas qui vient d’être franchi dans le processus de la transition en Guinée.

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