[Edito]Guinée: atteinte du syndrome de Stockholm, la junte libère Alpha Condé

Coup de massue à Conakry et le ciel tombe sur tout le pays ! C’est un événement que même les plus loyaux et farouches soutiens de l’ancien président n’auraient jamais attendu sitôt. Et pourtant, dans un communiqué lu dans la nuit de ce vendredi 22 avril à la à télévision nationale, les autorités de la transition ont brisé la glace en annonçant la libération d’Alpha Condé.

Acculée par le chiffon rouge de sanctions agité par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et défiée depuis quelques jours par des forces sociales et politiques internes, la junte a autrement répondu. Elle a posé deux actes qui risque de modifier profondément l’appréciation générale de l’écrasante majorité de la population vis-à-vis de la gestion de la transition. Il est clair aujourd’hui que le vent de soutien et de confiance des Guinéens au colonel-président s’estompe progressivement. On commence à parler de désillusion. Mamadi Doumbouya, cette semaine, s’est illustré dans ce registre de déception. Dans une valse de nominations au sein des cours et tribunaux du pays, les Guinéens se sont indignés lorsqu’ils ont constaté le retour aux affaires de Sidy Souleymane N’Diaye, le plus contesté des procureurs pour son rôle joué dans le système de répression d’Alpha Condé, notamment contre le troisième mandat. Et comme si cela ne suffisait pas, les militaires informent leurs compatriotes, qui ont applaudi et célébré leur coup d’Etat, qu’ils ont ont libéré définitivement celui qu’il ont déposé le 5 septembre pour prendre les rênes du pays. Pour renforcer aussi la stupéfaction du peuple, le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD), dans son communiqué, note ceci : << la dignité et l’intégrité d’Alpha Condé seront toujours préservées conformément à son rang, à son statut, et aux vertus de la tradition africaine.>>

Il ne pouvait pas avoir plus dure comme trahison. C’est le syndrome de Stockholm ! C’est carrément le début d’une autre vision de cette transition. Le colonel Doumbouya est en train de renier tous ses engagements aux Guinéens après le coup d’Etat. Il est clair qu’il a menti à tous. Tous les arguments avancés pour justifier son irruption dans le palais Sekhoutoureya sont faux.

Quand on sait que le bilan de l’ancien président a été un cataclysme social et un séisme économique. Alpha Condé, selon plusieurs observateurs, c’est un bilan macabre de plusieurs dizaines de Guinéens tués dans les repressions de manifestations de rue. Et dire que l’auteur de toutes ces atrocités est désormais totalement libre comme si de rien n’était, c’est le comble du mépris ! On comprend maintenant pourquoi la junte n’est obstinée qu’à juger les crimes économiques. Décidément, les crimes de sang resteront impunis. Et les morts sont envoyés dans la corbeille de l’histoire, comme toujours en Guinée.

Ce n’est pas une rupture, c’est la continuité du système Condé sans lui aux commandes. Retour à la case de départ.